samedi 15 décembre 2012

La mémoire : Psychologie cognitive (Lavergne)

1) Mémoire : définition et généralité
- "La mémoire est une capacité cognitive à réactiver partiellement ou totalement les événements du passé" (Tiberghien, 1997).
- "La mémoire est le moyen par lequel on retient et on retire de nos expériences passées l’info que l'on a besoin au moment présent". (Tuluing, 2000).
- "La mémoire est un processus permettant de conserver et d'évoquer des états affectifs, des infos acquises et des impressions enregistrées qui influencent le comportement." (Bécubé, 1991).
- Faculté mentale qui permet de conserver, d'acquérir une info et il s'agit au moment opportun de restituer les infos ultérieurement.
- La mémoire est le produit de traitement de l'info :


3 étapes :
A. Encodage : le fait de transformer les donnés d'entrée (info sensorielle) en une trace mnésique (représentation mentale).
Analyse des perceptions sensorielles : auditive, visuelle, olfactive...
On mémorise différents types d'infos.
B. Stockage : phase de rétention durant laquelle les traces mnésiques sont renforcées, conservées, et stockées pour un age différé.
Ce processus de stockage est facilité par un mécanisme de répétition mentale.
La rétention ne s'applique pas à l'ensemble des infos que nous rencontrons : lien avec l'attention.
C. Récupération : Phase de restitution, de réactivation de l'info précédemment stockée.
Permet d'accéder aux traces mnésiques afin de les utiliser pour percevoir, communiquer.
Activité +/- couteuse.
Plusieurs tâches / tests classiques qui permettent de rendre compte de ce que l'individu récupère et tente de rendre compte de l'info préalablement appris.

- La mémoire intervient quand on prête attention à l'info enregistrée par la mémoire sensorielle.
- Lieu de stockage transitoire où les infos sont maintenues afin d'être rappelé :

Plusieurs types de taches de rappel (Lockart, 2000) :
- Rappel sériel : le sujet doit rappeler les items dans l'ordre exact de leurs présentations.
- Rappel libre : consiste à demander à des sujets de restituer les infos qu'ils ont apprises, sans contrainte d'ordre.
-  Rappel indicé : au moment de la récupération, on présente une info, un indice en relation avec l'item à récupérer, qui facilite le rappel des items.

Système de traitement des infos :
Une seule ou des mémoires ?
Système unitaire - ensemble de sous-systèmes ?
Atkinson et Shiffrin (1968)
Squire et Zola (1991)

Système de mémoire :
Sensorielle - A court terme (Mémoire de travail) - A long terme (Explicite ou implicite)
Sémantique / Épisodique - Procédure, amorçage, conditionnement
Ensemble d'épisode non précis de la vie en général - Épisode précis de la vie

Modèle d'Atkinson et Shiffrin (1968) : 

Registre sensoriel -> MCT <---> MLT
Architecture sérielle de la mémoire en 3 composantes.
Structure justifiée par des données neuropsychologiques : patient H. M (décrit par Miller, 1959) qui présente une dissociation : détérioration des connaissances en MCT alors que les performances concernant les infos à CT sont restés normal.

Paramètre de la mémoire :
Quantité d’infos Mémoire Sensorielle MCT MLT
Capacité Faible 7 +/- 2 (Miller, 1956) Illimitée
Durée Quelques secondes Jusqu’à 30 secondes Indéfinie
Encodage Modalité spécifique Principalement auditive Sémantique, visuel, auditif

2) La mémoire sensorielle :
- Elle conserve une image assez précise et complète de l'info captée par le système visuel (mémoire iconique ou photographique) auditif (mémoire échoïque).
- Segner (1740) : cigarette qui tourne dans le noir. Persistance visuelle : notre système visuel maintient une certaine information alors qu'elle a disparu. 
- Le temps de stockage est très court (250-300 ms).
- C'est un type de mémoire provisoire qui conserverait l'info en attendant que celle-ci soit tracée ultérieurement. 

Sperling (1960) :
1) Présentation : 3 rangées de 4 lettres disposées dans un ordre aléatoire (i.e. 12 lettres) sont présentés pendant un temps très court (20 ms).
-  Tachistoscope
2) Tache : rappel libre des lettres : environ 4-5 sur 12.
3) Procédure :
Variante : au lieu de demander de rappeler les 12 lettres à la fois, on associe chaque ligne à un signal sonore (1ère ligne : son aigu, 2ème ligne : son médium, 3ème ligne : son grave). et fait entendre ce son juste après la présentation des 12 lettres.
-> Rappel : indicé d'une ligne : le sujet doit rappeler les lettres de la ligne correspondante.
4) Résultats : les sujets rappellent quasiment toutes les lettres de la ligne quelle que soit la ligne restée.
5) Explication : Sperling explique ces résultats en disant que les 12 lettres sont toutes momentanément disponibles, pendant quelques ms.
Autre condition : on fait varier le délai de présentation du signal sonore : les performances se dégradent progressivement dès 300 ms.
Cf. lien avec l'attention.

Critique -> "magot" (mot rare) -> plus facile à rappeler
Contrebalancement :
Pour bien faire, il aurait fallu présenter à chaque sujet, une liste de mots avec des positions différents pour être sûr que s'il y a un résultat en VD qu'elle soit lié à ma VI et non à l'effet du mot en soi.
Effet de primauté rend compte de la MLT : items du début peuvent être répétés et sont donc stockés en MLT.
Effet de récence rend compte de la MCT : derniers items sont encore en MCT lors du rappel.

Facteurs qui influencent ces effets :
- Temps de présentation influe sur effet de primauté : permet un meilleur stockage en MLT.
- Délai entre mémorisation et rappel : engendre la disparition de l'effet de récence mais n'a pas d'influence sur l'effet de primauté : augmentation du délai fait les derniers items ne sont plus en MCT au moment du rappel.

3) Oubli en MCT : déclin ou interférence ?
- Temps de stockage des informations en MCT : 30 secondes.
-> peut être augmenté si répétition mentale des informations.
- 1ère hypothèse : l'oubli en MCT s'explique par un déclin, une diminution du niveau d'activation des infos avec le temps.

- Paradigme de Brown & Peterson :
- présentation d'un trigramme (LVO)
présentation d'un chiffre à partir duquel le sujet doit compter à rebours de 3 en 3 pour éviter la répétition mentale du trigramme.
- rappel du trigramme après un délai variable : intervalle de 3 à 18 secondes.

LVO 673 ---- intervalle variable-----> Rappel LVO
-> Comptage à rebours de 3 en 3

- Plus le délai est long, plus les performances diminuent.
- Interprétation : l'oubli en MCT s'explique par un déclin de l'activation de l'info en fonction du temps.
- 2ème hypothèse : l'oubli en MCT résulte d'interférences.
-> Il y a compétition entre les infos, les nouvelles éliminent les anciennes.

Technique de l'item sonde (Waugh & Norman) :
- présentation auditive d'une liste de 16 chiffres
- le 16ème chiffre était toujours la répétition d'un chiffre précédemment présenté, appelé la sonde
- tâche : rappeler le chiffre présenté juste après la sonde

Manipulation de deux facteurs :
1) vitesse de présentation de la liste -> 1 ou 4 chiffres par seconde
2) nombre de chiffres entre la première et la deuxième présentation de la sonde

Le délai : entre le chiffre à mémoriser et son rappel covarie avec le nombre de chiffres en plus (nombre d'interférences).

Les résultats montrent que :
les performances varient : augmentent plus ou diminuent le nombre d'items (chiffres) introduit entre la présentation de la cible et son rappel.

- Wickens, Born & Allen (63) : partent du constat que dans la tache de Brown-Peterson, la baisse des performances n'apparait pas sur les premiers essais.
- Diminution des performances serait due à une interférence proactive (PI) : les anciens items interfèrent  avec les nouveaux.

- Changement de la nature des items présentés dans les 3 essais.
- 3 premiers essais : triplets de mots, 3 essais.

Wickens & Allen :
Levée de l'interférence proactive :
Lorsque la nature des items change, les performances reviennent au même niveau lors du premier essai.

Diminution de la performance causée par l'IP est inversée grâce à un changement de la nature des infos mémorisées.

L'oubli en MCT semble s'expliquer par des effets d'interférence plutôt que par un déclin des infos.

2 types d'interférence :
1) Rétroactive : les nouvelles infos perturbent la récupération des plus anciennes.
2) Proactive : les anciennes perturbent la récupération des nouvelles.

4) Formation des infos en MCT : Comment sont codées les infos en MCT ?
A) Les infos sont maintenues en MCT sous un code acoustique ou phonologique ? 


Conrad (1964) :
- Présentation visuelle de suite de 6 lettres
- Tâche : rappel des lettres dans l'ordre de présentation
- Résultats : en cas d'erreurs, les participants donnaient une lettre proche phonétiquement

B) Est ce que les infos sont codées uniquement sous acoustique ?

Wickens (1972) : code sémantique ?
- Utilisation du paradigme B&P
- Changement dans le matériel basé sur des catégories sémantiques.
- Si les propriétés sémantiques des infos sont codées en MCT alors on devrait observer une levée de l'IP.

Résultats : changement de catégories sémantiques engendre également une levée de l'IP.

C) Est ce que les infos sont codées à partir de propriétés visuelles ?

Stepard & Metzler (1979) : tâche de rotation mentale.
- Présentation d'une forme modèle.
- Puis présentation d'une seconde figure "double" qui a subi une rotation de O à 180°.


 

Résultats : ces temps de réponse augmentent en fonction du degré de rotation nécessaire pour se rappeler de la figure "cible" avec la même orientation que la figure modèle.

- Différents codes peuvent être utilisés (acoustique, sémantique, visuel, moteur...).
- La nature du codage peut verser en fonction :
   - de la nature du matériel présenté
   - de la pertinence du code pour la tâche à réaliser

Paradigme de Sternberg (1966) : 
- Présentation d'un ensemble de lettres à mémoriser allant de 1 à 6.
- Après 2 secondes, présentation d'une lettre cible.
- Tâche du participant : dire si la lettre présentée appartient ou pas à l'ensemble préalablement mémorisé.

                                       DFG
 Ensemble à mémoriser           >>>>délai de 2 sec >>>>  M (oui), K (non) 
                                       AMS

Selon Sternberg la recherche pouvait s'effectuer de 3 façons :
1) Processus de comparaison parallèle :
- Tous les items sont vérifiés en même temps.
- Pas d'influence de taille de l'ensemble à mémoriser.
-  Ni de la nature de la réponse (oui/non).

2) Processus séquentiel interrompu :
- Comparaison des lettres les unes après les autres.
- La recherche s'arrête dès qu'un appariement est trouvé.
- Temps de réponse devrait augmenter avec la taille de l'ensemble à mémoriser.

3) Processus séquentiel exhaustif :
- Comparaison des lettres les unes après les autres.
- La recherche ne s'arrête pas dès qu'un appariement est trouvé, toutes les lettres sont vérifiées.
- Temps de réponse devrait augmenter avec la taille de l'ensemble à mémoriser.

- Résultats identiques pour les réponses oui et non.
- Temps de réponse augmente linéairement de 38 ms par lettre supplémentaire dans l'ensemble à mémoriser.

N'invalide pas totalement le premier processus de recherche parallèle.

6) La mémoire de travail :
Le concept théorique de MDT suppose qu'un système a une capacité limitée, qui maintient et stocke des infos temporairement soutient les processus de la pensée humaine, en fournissant une interface entre : perception, MLT, action.

Définition : système de mémoire à capacité limitée permettant le stockage temporaire et la manipulation d'une info pendant la réalisation de tâche cognitives diverses.
 

La MDT se distingue a donc de la MCT dans le mesure où :
- MCT : système de stockage uniquement responsable de la rétention de l'information pour une durée brève.
- Alors que MDT : système de stockage et de traitement qui permet d'effectuer des traitements cognitifs sur les éléments qui sont temporairement stockés.

Modèle de la MDT :
- Modèle de Baddeley & Hitch (structural)
- Modèle de Cowan (fonctionnel)

Mémoire de travail ( Baddeley, 1986; B&H, 1974) :
  
                       
 

Le modèle propose que la MDT est un système hiérarchisé qui comprend 3 composantes :
1) Un administrateur central ou système central exécutif responsable des traitements.
2) 2 systèmes esclaves responsables du maintien des informations nécessaires à la réalisation de la tâche et domaine spécifique traitement d'un type spécifique d'info) :
- La boucle phonologique : spécialisé dans le traitement des infos verbales ou phonologiques.
- Le calepin visuo-spatial : spécialisé dans le traitement des infos visuelles et spatiales.


La boucle phonologique :
 
- Destinée au stockage temporaire de l'information verbale présentée auditivement ou visuellement.
- Composée d'un stockage phonologique et d'un processus de récapitulation articulatoire (analogue au langage subvocal).
-  Le stock phonologique reçoit directement et obligatoirement l’info verbale présentée auditivement, qu’il stocke sous la forme de codes phonologiques.

- L’information est maintenue pendant une durée fort brève (1,5 à 2 secondes).
- Le mécanisme de récapitulation articulatoire permet de rafraîchir l’information en la réintroduisant dans le stock.
- Il permet aussi le transfert de l’info verbale présentée visuellement vers le système de stockage phonologique.

Le mécanisme de boucle articulatoire possède 2 fonctions :
1) Permet de rafraichir l'info en la réintroduisant dans le stockage phonologique.
2) Assure le transfert de l'info verbale présentée visuellement vers le système de stockage phonologique.

=> Les infos présentées auditivement ont donc un accès direct du stockage phonologique alors que les infos visuelles ont un accès indirect par l'intermédiaire de la boucle articulatoire.

Arguments expérimentaux :
1) Effet de similitude phonologique
2) Effet de longueur des mots : met en évidence l'existence de la boucle, saturation du processus de répétition subvocale.
3) Effet de suppression articulatoire : processus de répétition subvocale par une tache interférente. But : occuper la boucle pendant la présentation des infos.

Le calepin visuo-spatial (CVS) :
Loge (95) propose 2 composantes pour le CVS :
- Qui traite les infos visuelles au sein duquel sont maintenues les infos  relatives à la forme, à la couleur.
- Qui traite les infos spatiales et celles relatives aux mouvements.
 

Impliqué dans la génération et la manipulation des images mentales.
Description de son fonctionnement beaucoup moins approfondi que celui de la boucle phonologique.

L'administrateur central :
- Il présente des ressources limitées.
- Il est aidé par les systèmes esclaves responsables du maintien temporaire des infos.
- Il est conçu comme système attentionnel qui permet de :
     - coordonner les opérations des sous-systèmes spécialisés et donc coordonner la réalisation de taches simultanées.
     - gérer le passage des infos entre ces sous-systèmes et la MLT.
     - procéder à la sélection stratégique des actions les plus efficaces.

Etude de Baddeley (1996) :
Production aléatoire de lettres.

Maintien en MDT d'une série de chiffres allant de 1 à 8 chiffres.
Prédiction : l'augmentation du nombre de chiffres à maintenir devrait augmenter les ressources...

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